Pourquoi un Centre de Recherche sur l´Enseignement des Mathématiques ?
Dans la Communauté française de Belgique, des dizaines de milliers d’enseignants s’efforcent pendant des millions d’heures chaque année d’apprendre des mathématiques à des centaines de milliers d’élèves et d’étudiants. Or si cet enseignement passe bien auprès de certains, pour beaucoup il est rebutant, dépourvu de sens, source d’échecs et de démoralisation. Même à ceux qui réussissent les examens, il ne donne parfois qu’une culture mathématique pauvre et éphémère.
Cet enseignement laisse subsister un taux élevé d’analphabétisme mathématique dans toutes les couches de la population.
On peut craindre en outre que, dans la mesure où il n’arrive pas à donner le goût des mathématiques, il empêche des vocations de mathématicien, physicien, économiste,… Peut-être est-ce là aussi une des raisons qui expliquent le recrutement actuellement insuffisant de futurs professeurs de mathématiques.
Ainsi, l’enjeu social de l’enseignement des mathématiques est énorme. Face à de si profondes difficultés, ne s’impose-t-il pas d’organiser un effort global de réflexion et de recherche ? La réflexion doit être globale, parce que l’apprentissage des mathématiques forme un tout depuis le moment où le bébé saisit les premières relations spatiales, jusqu’à celui où l’étudiant se bat avec les concepts de limite et d’espace vectoriel, en passant par celui où l’élève assimile les éléments de l’arithmétique, de l’algèbre et de la géométrie. Tout s’enchaîne en une longue maturation.
Or on constate que l’enseignement des mathématiques est pensé pour l’essentiel par tranches horizontales.
Les programmes des enseignements primaire et secondaire sont établis par des commissions distinctes, et ce n’est que tout récemment qu’un certain effort de coordination a été entrepris. Par ailleurs, les commissions de programme sont des lieux de réflexion et concertation, très importants certes, mais qui ne disposent pas de moyens de recherche.
Les maîtres du primaire, du secondaire inférieur et du secondaire supérieur sont formés dans des filières distinctes et sans coordination. A cause de ce morcellement et malgré quelques efforts récents de rapprochement, les instituts supérieurs pédagogiques et les services d’agrégation des universités n’atteignent pas la taille critique, condition nécessaire d’une recherche efficace.
Les recherches sur les enseignements maternel et primaire ainsi que certaines recherches sur l’évaluation dans le secondaire sont poursuivies presque uniquement dans les facultés de psychopédagogie, et les départements de mathématiques des universités y sont peu associés.
D’autres recherches - il n’y en a pas beaucoup - sur les mathématiques au niveau secondaire sont poursuivies dans les départements de mathématiques et ne font qu’exceptionnellement le lien avec le primaire.
Ces recherches aux divers niveaux influencent peu la pratique de l’enseignement.
Pour toutes ces raisons, il était important - on peut même dire nécessaire - de créer un centre de recherche qui étudie les problèmes que pose l’éducation mathématique de la prime enfance à l’âge adulte. Il était nécessaire que ce centre conjugue le souci d’une réflexion en profondeur avec celui d’aider les élèves et les enseignants dans leurs difficultés quotidiennes. Il fallait donc que ce centre complète son activité de recherche par un programme de formation continue. Le CREM a été créé pour tenter de répondre à l’ensemble de ces besoins.